Quand votre usine ferme ses portes du jour au lendemain, sans raison apparente, et que votre frère reprend contact avec vous après deux ans de silence pour vous annoncer que sa femme et sa fille viennent d’être kidnappées, vous pouvez vous dire que les choses ne tournent plus vraiment rond. Mais quand vous découvrez un lien entre ces deux évènements a priori totalement étrangers, vous comprenez qu’il ne s’agit là ni du hasard ni même de la malchance. Vous pouvez croiser les doigts et espérer que tout va bien se passer. Vous pouvez, mais au fond, vous savez qu’il est sans doute déjà trop tard et que plus rien ne pourra éviter le pire.
Ce livre est un thriller français dit politique, un aspect qui pourrait freiner plus d'un et pourtant il ne faut absolument s'arrêter à ce mot. Il faut se laisser tenter car on ne touche l'aspect politique qu'à partir de la moitié du roman et cela reste assez subtil et abordable. Pour ceux qui auraient peur de se perdre dans les méandres d'une campagne électorale, des élections ou de descriptions de différents partis, n'ayez craintes. On aborde ici plutôt les dessous inavouables, les petites manigances qui pourraient avoir cours dans ce milieu.
Ce livre a plusieurs points positifs. Tout d'abord, une intrigue bien ficelée qui donne, au premier abord, l'impression de partir dans tous les sens puisque l'on change de narrateur à chaque chapitre. Des destins qui semblent n'avoir rien en commun sinon l'horreur d'un kidnapping . Mais petit à petit on relie les fils et on voit se profiler l'histoire.
Ce changement de narrateur nous permet de découvrir un autre point fort : les personnages. Dont deux particulièrement qui ne pourront que vous touchez car forts et attachants.
Valéria tout d'abord, dont on ne sait quasiment rien au départ; dont le rôle dans cette histoire nous semble obscur. Et puis on découvre dans quelle situation elle se trouve réellement et ce qu'elle se voit contrainte de faire pour sauver ceux qu'elle aime. Valéria est belle et délicate mais se révélera être plus forte que ce l'on pensait.
Victor ensuite. Victor et la musique, Victor et ses théories, Victor et ses points de vue arrêtés, Victor et son passé douloureux. Un mec dont la philosophie de vie se résume à "Rien à foutre" :
"Il ne me reste Rien, va te faire Foutre, Rien pour demain, mieux vaut s’en Foutre"
Et puis un coup de fil et plus question de se foutre de tout. Victor est vraiment le point fort, dominant de ce livre. C'est lui qui vous scotche dans la lecture, qui vous donne envie de tourner les pages encore et encore. Son humour est juste un pur plaisir de lecture. Des petits traits ici et là, efficaces.
Le style de Stéphane Gravier est également l'atout de ce livre. Choisissant une narration à la troisième personne pour certains chapitres et à la première pour d'autres (ceux de Victor), il entretient habilement le mystère au fil des chapitres, distillant les informations au compte-goutte, mettant le lecteur dans la même position que les personnages. "Suivez les instructions". Une écriture simple mais imagée et efficace nous entraîne en seulement 230 pages de manipulations en manipulations jusqu'à ce que la vapeur se renverse.
Le mot de la fin ? Rien à foutre. Rien à foutre des supers productions d'auteurs archi-connus quand vous découvrez un auteur français n'ayant pas les même moyens de promotions mais au moins autant de talent !
Merci à Stéphane Gravier pour m'avoir permis de découvrir son roman, une excellente lecture.
A noter : la lecture de Bloody Valéria s'accompagne d'une bande-son disponible sur deezer, bande-son des plus éclectique puisque passant de Franz Ferdinand à Boney M, avec une petite pointe d'AC/DC.
232 pages
Disponible aussi en PDF
2010